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samedi 3 août 2013

Restaurant Gaya par Pierre Gagnaire à Paris (7ème)


Ce ne fut pas une mince affaire que de trouver un restaurant gastronomique  à Paris au mois d’août entre les restaurants fermés et les cartes d’été aux salades diverses et variées…
Désespérée, affamée de créativité, perdue au bord de mon frêle esquif, je commençais à abandonner… quand soudain quelques lumières m’éblouirent à l’aperçue furtive du restaurant Gaya au beau milieu de la mer de Saint Germain des Prés !
Cessons de plaisanter, il est vrai que Gaya est un des seuls restaurants étoilés à Paris ouvert en août et je ne m’en suis pas privée ! J’avais souvent lu sur les blogs que c’était une cuisine plutôt simple, de produit, éloigné du style du restaurant  3 étoiles du chef Pierre Gagnaire, je fus très agréablement surprise ! Il y a une réelle signature artistique dans cette cuisine contemporaine, libre et musicale. Le midi vous y trouverez un menu à 60 euros mais le soir vous composerez vous-même votre menu à la carte. C’est ce que nous avons choisis de faire, mon mystérieux ami et moi. Le lieu boisé m’a inspiré un univers de bateau avec son bar et une petite vue sur la cuisine. Il s’y dégage une atmosphère décontractée et chaleureuse. Nous commençons par quelques mises en bouche : sommité de chou-fleur dans un velouté au cresson à déguster avec biscotte croustillante et tartelette aux épices, agrumes confits, sucrés et mascarpone.
 
 
 
 
 
Je choisis tout d’abord la chair de tourteau concombre, haricots verts liés d’une mayonnaise au plancton. Une sensation de suspension entre abondance végétale et plongée sous-marine dans les profondeurs d’eaux douces et iodées. Pas une seule bouchée ne se ressemble.  Explosion de vie et silence aquatique.
 
 
 
Mon ami choisit le gnocchi d’épinard, velouté Vert, palette ibérique et courgette à la vapeur. C’est un tableau de chlorophylles à l’accent méditerranéen et  gourmand. On reconnait la signature du chef par l’effervescence  de goûts et l’équilibre surprenant de tous les produits rassemblés en bouche.
 

Sous cette canicule parisienne, je choisis une deuxième entrée froide à la place d'un plat: Déclinaison de tomates : farcie ricotta/olive noire, soupe glacée, granité, salade, glace vinaigre balsamique. C’est un  jeu de textures délicieux, rafraichissant et enfantin. La puissance du goût de la tomate est sublimée par un contraste de température entre la tomate farcie tiède, les tomates fraiches et la soupe légèrement givrée « picotante » en fin de bouche.
 

 

Mon ami choisit le plat semainier servi habituellement au menu du déjeuner. Ce sont des coquillages et crustacés et noddi-marini. Ici point d’écume au siphon mais deux sauces, l’une mousseuse et l’autre plus crémée (mais qui se relèvera très digeste !) soulignant le goût des divers coquillages. Le homard servis entier avec ses pinces, de qualité parfaite est sublimé par la prolifération des produits : légumes, épices, sauces mais qui par miracle (et travail…) s’allie parfaitement faisant de chaque bouchée une surprise.
 
Les pâtes « noddi-marini » en forme de calamar aux goût de coquillage claquent et fondent sous la langue...


Hésitants sur le choix des desserts, le service nous propose de nous préparer trois desserts en portion dégustation. Tout d’abord le biscuit Belle Ile en mer qui est un biscuit aux multiple couches de praliné avec sa compote d’abricot. Craquant, onctueux, et fruité. Un très bel équilibre avec la signature circulaire du biscuit et l’éparpillement poudré de l’assiette.  
 

 

Puis la compote de rhubarbe, loukoum à la rose, guimauves au coquelicot, groseille, Panna-cotta au kirsch. C’est un parfum floral et fruité où s’entremêle douceur et caractère relevé par le kirch. Cela m’inspire un tableau d'un paysage abstrait comme l’éclosion d’un jardin imaginaire à la levée du jour.
 

Enfin,  la Ganache Equateur, sorbet chocolat ; sablé cheesecake aux amandes fraîches. Le Yin et le yang. C’est un dessert peu sucré, même légèrement salé par le sablée cheesecake, où l’on retrouve la complémentarité de l’amertume du chocolat plus de 70% de cacao et l’amertume de l’amande brute, fraîche, marinée dans du lait, ce qui lui donne une texture tout à fait particulière et surprenante. Cette dualité que tout pourrait opposer, nous livre comme un clin d’œil philosophique, un parfait équilibre de saveurs.

 

C’est une cuisine personnelle qui donne à réfléchir à la vue, aux goûts, aux enchevêtrements et aux textures. On y retrouve des inspirations d’arts contemporains, Kandinsky, Pierre Soulages… où comme dans ces tableaux le regard et le goût n’y est jamais le même et ne cesse de se métamorphoser en fonction des associations choisies et du point de vue abordé. La réalité à un moment donné n’est pas celle de l’instant qui suit…
Quelques mignardises pour terminer ce voyage qui donne envie d’aller plus loin… tartelette au citron et chocolat-framboise.
 
J’ai apprécié la liberté et le désordre ordonné de cette cuisine mais aussi l’aspect humain d’une équipe qui semble  travailler en harmonie, bonheur et  décontraction. La vie est faite d’oxymores, de paradoxes, de contrastes et de contradictions, Pierre Gagnaire et son équipe mettent cette vie en couleur et en saveur !
 

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